L’humanité ira mieux lorsque nous cesserons de massacrer émotionnellement les bébés par millions.
Wilhelm Reich – Ecoute Petit homme.
L’être humain est d’une telle richesse et complexité mélangées qu’on ne saurait mettre en équation les facteurs de son épanouissement et de son bonheur de vivre. Et certainement tout ne vient pas du jardin de notre enfance. Mais en tant que socle essentiel de nous-mêmes, nous devons beaucoup à ce jardin.
L’humanité ira collectivement et individuellement mieux lorsque ce jardin cessera d’être un jardin de ronces pour un jardin de fleurs écloses. Le terrible constat dressé par Wilhelm Reich est toujours valable, moins d’un siècle plus tard.
Car encore rares sont celles et ceux qui ont été accueillis comme il se Doit (et ce d majuscules marque toute la déférence que nous devons à la vie), mais plutôt comme il se peut. Nous allons passer du pouvoir au devoir, non dans le sens moral, mais dans le sens de la responsabilité sacrée.
Ainsi, la lumière de l’enfance, rendue a sa pleine expression, affranchira les humains de ses tendances destructrices, fratricides, avides et égoïstes. Car ces déchirures de l’amour ne sont pas dans la nature de l’homme, mais le fruit d’attentes non assouvies, de besoins primaires non satisfaits, de violence reçues, parfois même à l’insu de tous.
La lumière de l’enfance, rendue a elle-même, sera en mesure d’enfanter une masse suffisante des comportements altruistes, respectueux de la vie, joyeux, créatifs et déterminés.
Je souhaite ardemment à chaque être humain de faire l’expérience d’un accueil inconditionnel sur cette terre, fait de présence, d’amour, de regards échangés. Une telle expérience, je l’ai vécue à plusieurs reprises. J’ai eu ce bonheur. J’ai pu la vivre grâce aux êtres dévoués que j’ai croisés sur mon chemin de vie. Aussi parce que je suis allé la chercher.
Je l’ai vécue plusieurs fois sur mon chemin d’être. Au fil du temps, les larmes qui accompagnaient l’expérience de l’accueil premier se chargeaient de moins en moins de la tristesse du manque et de plus en plus du bonheur incommensurable d’être accueilli, d’être là, d’être avec.
La rencontre avec l’expérience de cet accueil est totalement bouleversante. Essentielle, les mots peinent. Les mots piétinent.
Je sais désormais dans chacune de mes cellules ce que cela fait que d’être accueilli de la sorte. J’en ai émergé avec une confiance inébranlable dans la vie, une assurance de sécurité, un dédouanement de la souffrance, la fin de la plainte en soi, la fin de la recherche du point d’appui en dehors de soi. L’inclusion, c’est la participation. La conviction charnelle de faire partie de ce monde.
Cet élan confiant vers l’avant,
Le sentiment vécu du bonheur profond indépendant de la présence d’un autre,
La fin des vides sans raison,
La fin des gouffres où plonge la lumière,
La fin des pierres lourdes dans le coeur,
La fin des fleurs noires qui se nourrissent du sang d’encre,
Une source inépuisable d’énergie positive,
Une gratitude existentielle envers le sentiment permanent d’être aimé de la vie.
La fin des moussons, le début de la bruine et de la pluie légère.
La fin de l’angoisse et de la peur irraisonnée. La gratitude à chaque souffle. Le sentiment d’appartenance et d’échange avec toute chose. Ce vol d’oiseaux au dessus du clocher, cette petite plante dans un pot sur un rebord de fenêtre, ces gens autour, ces lignes de vies qui se croisent et croisent la notre. Un maillage précieux, fait d’échange de substance vivante et vitale invisible. Une nourriture qui se donne et se reçois. La fin de la méfiance. Surtout, le sentiment incarné d’être juste, à sa place.
N’est-ce pas là ce à quoi nous aspirons tous et toutes, universellement?
Je sais aussi que cela est possible d’offrir cela à chacun de nos enfants arrivant sur cette terre. Ce n’est pas une chimère. Pour moi, c’est une réalité, non encore advenue mais inéluctable. Je sais aussi que cela est possible d’offrir cela à chaque être humain, même bien après qu’il fut venu(e) au monde. Dans les deux cas, il faut juste créer les conditions, encourager l’expérience, favoriser les initiatives, donner de l’air à ce mélange vicié que nous respirons depuis si longtemps.
C’est pour cela que j’écris : pour que chacun puisse avoir l’immense chance, comme je l’ai eue, de se vivre pleinement accueilli par la vie.
C’est par ce passage que nous aurons la possibilité, pour tout un chacun de nous, d’accompagner notre humanité vers un destin collectif d’amour et non de folie et de destruction collectives. Ce pouvoir, chacun de nous peut l’exercer. C’est la fin enthousiasmante du sentiment d’impuissance : que puis-je faire pour que le monde aille mieux ? Nous pouvons faire, c’est à notre portée, c’est très concret.
Par notre attention consciente et notre émerveillement renouvelés devant la beauté de la lumière de l’enfance, à nulle autre pareille, chacun et chacune de nous, parent, éducateur, proche, tuteur, avons la possibilité tangible et réelle de créer un monde d’amour sur cette terre.
Et d’offrir aux hommes de contempler a nouveau leur visage sacré, dans ce qui sera peut-être la prochaine évolution spirituelle de l’humanité.
Photo : Dreamstime.