Je veux ce pont rutilant de lumière
Comme une guirlande de Noël
Comme une artère de sang doré
Enjambant les eaux sombres et troubles
Des secrets et des songes
Et les eaux circulaires
Des trop anciens mensonges
Un pont parcouru de frissons rectilignes
Et de vivants pressés
Tel un flot séminal
De lucioles amblyopes
Aimantées, telles des isotopes
Par les rives éclairées
Et les franches béances
Aux grandes façades immenses
Je veux ce pont solide
Effilé en ses lignes
Luisantes comme les ailes d’un aigle
Dans un ciel de violine
Un pont aux piliers imposants
Arqués comme des solstices
Décorés, eux-aussi
De lames étincelantes
Comme des bijoux de femme Atalante
Oui,
Je veux ce pont de lianes
Et de haubans d’acier
Suspendu entre l’avenir
Le présent et le passé
Cette arche synaptique
De lumière ruisselante
Surplombant les abîmes
Saturées de flots noirs
Où un grand bateau blanc
Grave la nuit tranquille
d’un glyphe d’eau liquide
qui va s’élargissant
J’aime traverser ce pont
Et observer l’en-face
Sur la rive à venir : promesse reformulée
En ses mille lumières
Vois ! à perte de vue
Nulle tanière
Rien que des rues et des boulevards
Et des avenues neuves
Ivres de foules vives
Tous éclairés par une énergie folle
Plus rien n’est rien dans l’ombre
Mais un jour lassé
D’autant d’ors et de gens
J’irai voir les montagnes
Aux écharpes de vent
Où des neiges altières
Couvrent de pagnes bleutés
Les épaules puissantes
Et les dos immobiles
Des grandes roches reptiles
Et là
Ayant l’enfin
Je m’enivrerai
Des franchises des parois
De la fraîche certitude des glaciers
Et de l’esprit du Vide.