Je suis issu d’un temps de pierre.
Je suis issu d’un temps où le pas des hommes résonnait sur la pierre.
Où les hommes eux-mêmes raisonnaient sur la pierre.
Un temps où sable, pierre, bois et verre bâtissaient des églises.
Où les fontaines donnaient voix aux rochers.
Un temps qui s’est perdu, mais qui, pourtant, demeure.
Confusément. Irrémédiablement.
Je sens bien qu’un lien subsiste.
L’ombre du pas d’un homme,
Le cliquetis d’un sabot,
Une coulée de lierre à l’angle d’une façade,
Une silhouette disparaissant dans une ruelle étroite,
Deux garnements roublards, casquette et mains empochées,
Un regard curieux, teinté de vague inquiétude,
Et toujours le bois, la pierre, le sable et puis le verre.
Un panache de vapeur ? Steamer ou bien loco,
Des éclats de pioche, à l’orée du cimetière,
Et le son des étoffes, qui s’échangent de mains,
L’osier empli de fruits,
Et la route poudrière…
Tout ceci est en moi, me traverse, me parcourt. Il ne faudrait pas grand-chose pour que je m’y arythme et que je m’y replonge.
Je suis issu d’un temps de pierre.
Parfois, à l’aurore,
un frisson de roche
vient me le rappeler.
Et l’homme que je suis
Relisant avec tendresse
Les vers du tout jeune homme
Ecrits à ses vingt ans
N’ajoutera qu’une chose :
Et j’appelle que la pierre épouse le cristal.
(Roquebrune sur Argens)