Nulle aube, nul reflet, nul coucher de soleil; nul jeu de lumière ou de couleurs sur quelque création naturelle ou humaine que ce soit;
Nulles noces photoniques jetant un brasier d’étains célestes au creuset des étoiles; nulle oeuvre d’art,
Nul drapé de soie nés de l’œil et de la main du Maître;
Nulle polychromie minérale tracée par une main ancestrale au front d’une roche éternelle.
Rien de tout cela ne peut espérer égaler ni même atteindre en beauté et en mystère cette lumière…
La lumière de l’enfance.
La lumière de l’enfance, nous la reconnaissons immédiatement, même sans l’avoir jamais vue, lorsque nous croisons le regard de l’enfant pour la première fois.
Cette lumière qui inonde notre vie dès que l’enfant paraît, qui éclaire toute notre vie d’une lueur nouvelle, comme si, auparavant, les couleurs existaient mais incomplètes, pales, ternes ou intermittentes.
Regarder profondément dans les yeux de l’enfant. Que cet enfant soit né de vous ou pas; Pour une fois, ne pas penser à ce qui est, à ce qui devrait. Juste plonger son regard dans le regard de l’enfant, et laisser la rencontre s’opérer. Se rendre totalement disponible, réceptif. Et la lumière parait.
Comme une révélation.
C’est une lumière totale, d’une pureté sans pareille, qui jamais ne peut blesser nos yeux, mais au contraire éclaire chaque recoin de notre être, chacun de nos gestes, chacune de nos paroles, la moindre de nos pensées, le moindre des battements de notre cœur.
Une lumière qui révèle le monde à nos yeux habitués et souvent fatigués. Une lumière sur laquelle se construit en promesse le monde à venir, réseau de citadelles translucides redonnant à l’infini la lumière amplifiée du ciel et de ses hôtes éternels.
Une lumière qui est a la fois très proche de nous et très éloignée. Très proche car toujours là, devant nous, intangible. Très éloignée car il n’y a pas de réalité plus distante de nos vies quotidiennes que ce mystère dans lequel s’ancre cette lumière; ce qu’elle appelle comme reconnaissance et comme soins, et ce qu’elle implique de nous, parents ou éducateurs, comme présence-réponse.
Rencontrer cette lumière, à nulle autre pareille, est un des plus beaux cadeaux qu’il m’ait été donné de vivre.
Cela s’est produit juste après la naissance de notre fille Naia, lorsqu’ouvrant les yeux sur notre monde pour la première fois, ses yeux ont rencontrés les miens. Je la tenais contre moi, fasciné, vibrant d’émotion, et elle m’a regardé. Jamais je n’oublierai la qualité unique de ce regard. Jamais je n’avais été regardé avec une telle intensité, une telle profondeur, une telle pénétrance et un tel amour. Ce fut comme un choc, un déchirement dans le ciel de ma vie.
Et depuis, malgré les difficultés parfois, je crois qu’il n’y a pas un seul jour où je n’ai pas ressenti la rémanence de cette rencontre, sous la forme d’une sensation que je ne peux que qualifier de lumineuse, à défaut d’autre terme.
Cette lumière de l’enfant…
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